Dans un marché qui arrive à saturation et où la guerre des prix fait rage, des opérateurs de téléphonie mobile néerlandais ont lancé des produits ciblés vers une communauté, ethnique ou religieuse. En septembre, le plus gros opérateur néerlandais, KPN, lançait ""Ay Yildiz, la Turquie à partir de 17 centimes par minute"".
Ses cartes prépayées s'adressent aux 364.000 Turcs vivant aux Pays-Bas.
Elles se vendent dans les magasins du groupe, mais aussi dans les mosquées ou les épiceries turques.
Et toute la communication est en néerlandais et en turc : affiches publicitaires, site internet, ... même au centre d'appel, le client est accueilli par un ""Hos geldiniz"" (bienvenue en turc).
Avec Ay Yildiz, ""KPN donne plus de consistance à sa stratégie de segmentation et de multiplication des marques"", expliquait récemment Marco Visser, directeur de la division téléphonie mobile aux Pays-Bas.
""Nous voulons développer des offres plus à de segments de marchés spécifiques et avec cela, répondre aux besoins de groupes cibles particuliers"", ajoutait-il.
Une nécessité pour ces opérateurs : le marché européen, équipé à 90%, arrive à saturation et la concurrence fait baisser les prix. Lundi, la Commission européenne a répété qu'elle voulait une baisse des tarifs des appels mobiles passés ou reçus à l'étranger.
""Le prix n'est pas tout"", estime pour sa part Jim Rademaker, dont la société UTS, premier opérateur de téléphonie mobile dans les territoires néerlandais d'outre-mer, a lancé en avril ""Chippie, l'appel bon marché vers les Antilles néerlandaises, Aruba et Surinam"".
""Notre concept, le Chippieland, est surtout communautaire"", explique-t-il à l'AFP. Comme Ay Yildiz, Chippy propose aussi des tarifs compétitifs entre utilisateurs de la marque.
""Huit utilisateurs de téléphone mobile sur dix nous utilisent sur une île comme Curaçao, or ces gens veulent appeler et se faire appeler par leurs enfants partis étudier ou vivre aux Pays-Bas"" continentaux, raisonne-t-il.
Sa marque cible aussi les voyageurs. ""Qu'on soit aux Pays-Bas ou bien de l'autre côté de l'océan sur l'île de Saint-Martin ou bien au Surinam (ex colonie néerlandaise d'Amérique centrale), on appelle pour le même tarif"", explique Jim Rademaker.
Chippy fait sa promotion sur des sites internet communautaires, dans les magazines pour les Afro-antillais, ou sur des radios locales diffusant zouk et salsa.
Pour l'analyste du site Telecompaper.com, Ed Achterberg, ""il n'est pas certain que toutes ces offres auront du succès car même le marché ethnique commence à être saturé (...) et les groupes ciblés restent assez petits"".
""Ce n'est pas parce qu'on vous parle en turc que vous allez changer d'opérateur"", estime-t-il.
Et puis, souligne Ed Achterberg, il y a la concurrence des poids lourds implantés depuis plus longtemps, comme le britannique Lebara, spécialiste des appels mobiles à prix cassé vers l'étranger qui propose depuis octobre 2005 ses services par abonnement, et non plus seulement par carte prépayée.
Lebara s'adresse à ""la société multiculturelle (...) quiconque a immigré aux Pays-Bas ou de la famille à à l'étranger"", a expliqué à l'AFP son porte-parole Jon Fawcett. ""Aux Pays-Bas, il y a une importante communauté musulmane, aussi offrons nous une partie de nos services, dépliants et de notre site web en arabe"".
En septembre 2005, Lebara lançait ainsi aux Pays-Bas un téléphone high-tech, le Ilkone i800, programmé pour rappeler à son propriétaire l'heure de la prière musulmane cinq fois par jour, lui indiquer la direction de la Mecque et comportant un exemplaire du Coran en arabe et en anglais, une première en Europe.
Comme leur gros concurrent Ortel, ""leur force réside dans leur réseau distribution"", estime Ed Achterberg, car ils sont présents à la fois dans les magasins de téléphonie classique et dans les magasins proposants des appels fixes à bas prix vers l'étranger.

LA HAYE, 19 déc 2006 (AFP)