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Catégorie : France
Les remèdes musclés de Ségolène Royal pour les banlieues ont provoqué jeudi des remous dans les rangs du Parti socialiste, renvoyé à ses propres difficultés à définir sa ligne en matière de lutte contre la délinquance. Le discours de la "présidentiable" socialiste préférée des sondages a en revanche fait les délices de la droite, Nicolas Sarkozy en tête, qui a estimé que la présidente de Poitou-Charentes "était sur le bon chemin".
Alors qu'ils tentaient de consacrer "exclusivement" leur conférence de presse matinale aux nouveaux adhérents du PS, François Hollande et Jack Lang ont eu du mal à cacher leur embarras.
Pressé de questions, le premier secrétaire s'est retranché derrière le projet présidentiel du PS, qui doit être adopté la semaine prochaine par le Bureau national.
Si pour l'heure "toutes les contributions sont les bienvenues", il n'y aura "qu'un seul projet socialiste" qui "liera le ou la candidate choisi par les militants", a assuré le compagnon de Ségolène Royal.
Jack Lang, ancien ministre de l'Education, a fait mine de ne pas comprendre la "tempête" soulevée par les propos de sa concurrente à l'investiture présidentielle.
"Je n'ai aucun désaccord parce que ce qu'elle a dit reprend des idées que nous avons ensemble réalisées au gouvernement, elle-même ou moi-même", a-t-il expliqué, préférant s'époumoner contre le gouvernement Villepin, coupable de "crime contre l'avenir" en supprimant 120.000 emplois dans l'Education nationale.
Devant un demi-millier d'habitants de Bondy, en Seine-Saint-Denis, Ségolène Royal a prôné mercredi soir une "politique beaucoup plus ferme", une "reprise en mains lourde" des familles et de l'école afin de "tarir la source de la délinquance".
Elle propose notamment de placer d'office sous "encadrement militaire" les jeunes de plus de 16 ans "dès le premier acte de délinquance" et de mettre sous tutelle les allocations familiales "dès la première incivilité" des élèves.
"En toute amitié", Jean-Christophe Cambadélis, bras droit de Dominique Strauss-Kahn, voit dans ces propos un "dérapage".
MAUVAIS SOUVENIRS "La militarisation de la sécurité, ce n'est plus l'ordre juste mais juste l'ordre", estime froidement le député de Paris.
Les partisans de Laurent Fabius s'embarrassent moins des formes, qui reprochent à Ségolène Royal d'occulter les causes socio-économiques de la délinquance.
Ségolène Royal "emprunte à la rhétorique sécuritaire de Nicolas Sarkozy", déplore la député fabiusienne Bariza Khiari.
"La vraie fermeté, c'est d'agir et de refuser le laxisme, sans tomber dans la démagogie ou les fausses solutions", renchérit Jérôme Guedj, l'un des huit "équipiers" de campagne de l'ancien Premier ministre.
En s'éloignant du discours traditionnel du PS - basé sur le tryptique "éducation-prévention-répression", avec une nette préférence pour les deux premiers piliers - la députée des Deux-Sèvres rappelle de mauvais souvenirs au PS, qui estime avoir en partie perdu la présidentielle de 2002 sur les questions de sécurité.
Pendant la campagne, Lionel Jospin avait même avoué sa "naïveté" en matière de lutte contre la délinquance. Cinq ans plus tôt, le colloque de Villepinte avait pourtant marqué la fin officielle de l'"angélisme" du PS dans ce domaine.
"Courir derrière la droite, on a vu où ça nous menait", s'emporte Razzye Hammadi, président du Mouvement des jeunes socialistes, "la course à l'échalote avec Nicolas Sarkozy nous perdra".
"Très fâchée", l'organisation de jeunesse du PS milite désormais pour la "mise sous tutelle des idées démagogiques".
PARIS, 1er juin (Reuters)