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Catégorie : Actualité
La coalition de centre-gauche emmenée par Romano Prodi a remporté la Chambre des députés du Parlement italien, selon les résultats finals des élections législatives publiés tôt mardi par le ministère de l'Intérieur. Les résultats pour le Sénat étaient cependant toujours partiels. A la Chambre des députés, l'Union de Romano Prodi remporte 49,8% des votes contre 49,7% pour la Maison des Libertés (coalition de centre-droit) de Silvio Berlusconi. Selon une nouvelle loi électorale, la coalition gagnante obtient automatiquement 55% des sièges.

Au Sénat, les résultats accordaient une avance d'un siège à la coalition de Silvio Berlusconi, avec 155 mandats contre 154 pour l'Union de M. Prodi. Cependant, six sièges de sénateurs restent encore à pourvoir avec le vote des expatriés.

Il fallait donc attendre les résultats du dépouillement de ces bulletins pour savoir si, au terme d'une soirée marquée par l'incertitude et les revirements des pronostics, l'Italie se retrouverait pour la première fois de son histoire avec deux majorités contradictoires -ou si la coalition de M. Prodi dominerait les deux chambres du Parlement. Une certitude cependant, les Italiens ont voté en masse, le taux de participation atteignant près de 84%, selon le ministère de l'Intérieur.

Malgré les mandats ouverts au Sénat, Romano Prodi a déclaré la victoire de son camp peu avant la publication des résultats finals pour la Chambre des députés.

"Nous avons gagné et nous devons maintenant commencer à travailler pour appliquer notre programme et unifier le pays", a déclaré un Prodi triomphant devant ses partisans.

"Je suis reconnaissant à vous tous parce que ce fut une bataille très difficile", a-t-il ajouté. "Jusqu'à la fin, nous sommes restés dans le suspense, mais à la fin la victoire est arrivée".

Le porte-parole de M. Berlusconi, Paolo Bonaiuti, a cependant contesté la revendication de M. Prodi. "Le centre-droit conteste que le centre-gauche ait gagné", a-t-il déclaré à l'agence ANSA et à la RAI.

Un haut responsable du parti de M. Berlusconi, Forza Italia, a ajouté que la droite pourrait demander un nouveau décompte.

"A ce point, nous pensons qu'il est nécessaire et approprié d'exiger un contrôle et une vérification du vote dans la Chambre des députés, afin d'avoir un résultat que nous pouvons considérer comme certain et final", a déclaré Sandro Bondi, qui a également critiqué l'"attitude politiquement irresponsable et aventureuse" de M. Prodi.

De leur côté, des alliés de M. Prodi ont concédé lors d'une émission télévisée, suite à la déclaration de victoire du leader de la gauche, que les résultats pour le Sénat demeuraient partiels. Les responsables de la gauche Francesco Rutelli et Massimo D'Alema ont cependant suggéré que leur camp obtiendrait un siège de plus que la droite au Sénat, selon l'agence ANSA.

L'hypothèse de deux majorités contradictoires ne pouvait toutefois pas être écarté, ce qui rendrait le pays ingouvernable. Le Sénat et la Chambre des députés ayant en effet un pouvoir égal, il est nécessaire pour pouvoir gouverner d'avoir la majorité dans les deux assemblées. Les dirigeants de gauche comme de droite des deux coalitions ont déjà expliqué qu'en cas de majorités opposées, de nouvelles élections législatives seraient inévitables.

Une possibilité dans ce cas pourrait être la formation d'un gouvernement d'union chargé de gérer les affaires économiques et l'élection présidentielle -le mandat du chef de l'Etat prenant fin en mai prochain- ainsi qu'un nouveau scrutin législatif à l'automne.

"Nous devons immédiatement envoyer un message aux marchés, à quiconque souhaitant investir en Italie que le pays ne va pas se décomposer", a déclaré le ministre de la Culture Rocco Buttiglione.

Pendant la campagne électorale, les sondages avaient laissé prévoir un scrutin serré, même si la gauche était donnée favorite.

Une grande proportion d'indécis rendait toutefois délicat tout pronostic.

Le bilan économique de Silvio Berlusconi, richissime homme d'affaires de 69 ans, a en effet manifestement déçu, alors qu'il avait promis de diriger l'Italie comme il le faisait avec ses propres entreprises. Il aura tout du moins réussi à rester au pouvoir durant toute la législature, ce qui n'était jamais arrivé depuis la restauration de la République après la guerre, alors même que sa coalition était minée par la désunion.

Mais ce magnat des médias, de la publicité et de l'édition, propriétaire du club de football du Milan-AC et d'intérêts dans les assurances, aura souvent choqué par des déclarations à l'emporte-pièce, frisant le populisme. Il est douteux que le fait d'avoir traité de "couillons" les électeurs de gauche quelques jours avant le scrutin ait beaucoup fait remonter sa cote de popularité.

A gauche, si Romano Prodi, 66 ans, surnommé "le professeur" et ancien président de la Commission européenne, a fait une campagne moins haute en couleurs, plus conforme à une personnalité parfois qualifiée de terne, il est à la tête d'une coalition qui risque d'être tout aussi, sinon plus, difficile à gérer que celle de la droite. "L'Unione" va en effet du centre à la gauche communiste.