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Catégorie : Actualités France
Le passé colonial de la France en Algérie, de nouveau dénoncé cette semaine par le président algérien Abdelaziz Bouteflika, continue de peser sur les relations entre les deux pays, retardant d'autant la signature d'un traité d'amitié annoncée depuis 2003. Pour la seconde fois en dix jours, M. Bouteflika a réitéré jeudi sa demande d'"excuses officielles" de la France envers le peuple algérien pour les crimes commis sous la colonisation de l'Algérie (1830-1962).
Il a appelé l'Etat français à "assumer pleinement ses responsabilités historiques, s'il était véritablement mu par une sincère volonté d'ouvrir une nouvelle page et de jeter les bases d'une amitié authentique".
Le 8 mai, à l'occasion du 61e anniversaire des massacres du 8 mai 1945 commis par l'armée française dans les régions de Sétif et Guelma (est algérien) il avait déjà posé de telles excuses officielles de Paris comme préalable à la signature d'un traité d'amitié entre les deux pays.
Des "excuses publiques et solennelles pour le crime de colonialisme commis contre notre peuple" constituent un "droit élémentaire de l'Etat-Nation algérien", avait-il dit, tout en affirmant qu'"il n'existe pas de crise dans les relations algéro-françaises".
Les autorités françaises ont réagi à sa demande en soulignant que le débat sur la période coloniale française en Algérie revenait aux historiens.
"Il appartient aux historiens et aux chercheurs de se pencher sur le passé" car "ce n'est pas à une lecture officielle de l'histoire que l'on doit procéder", a déclaré vendredi le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Jean-Baptiste Mattéi.
"Laissons aux historiens le soin d'écrire l'Histoire et laissons au temps celui d'apaiser les douleurs", a pour sa part déclaré la ministre française déléguée aux Affaires européennes, Catherine Colonna, estimant que le rôle de Paris et d'Alger devait se limiter à "faciliter" le travail des historiens.
M. Mattéi a par ailleurs rappelé que Paris "veut travailler au renforcement des relations bilatérales" avec l'Algérie et "conserve l'objectif de conclure un traité d'amitié".
La signature de ce traité, prévue avant fin 2005, n'a pu avoir lieu en raison de la polémique suscitée par la loi du 23 février 2005, dont un article, par la suite abrogé, mentionnait "le rôle positif" de la colonisation française.
Le chef de la diplomatie française, M. Philippe Douste-Blazy, s'est rendu à Alger début avril afin de relancer ce projet de traité, annoncé en 2003, les présidents algérien et français s'étant alors engagés à "renforcer la coopération politique, économique, culturelle et scientifique" pour instaurer un "partenariat d'exception" entre les deux pays.
Tout en affirmant que son pays "reste toujours attaché à la signature du traité", son homologue algérien, Mohamed Bedjaoui, avait souligné que subsistaient "des difficultés" dont "il faut tenir compte". Il avait notamment estimé que l'adoption de la loi du 23 février avait montré que "l'opinion publique française n'était peut-être pas prête" à un tel traité.
Cette loi avait suscité de vives réactions en Algérie. M. Bouteflika avait affirmé qu'elle relevait d'"une cécité mentale confinant au négationnisme et au révisionnisme" et avait exigé une "repentance" de la France pour "les crimes" commis sous la colonisation.
Les Français "n'ont pas d'autres choix que de reconnaître qu'ils ont torturé, tué, exterminé de 1830 à 1962 (...) qu'ils ont voulu anéantir l'identité algérienne", avait-il déclaré en août 2005.
Un an plus tôt pourtant, les relations bilatérales, longtemps marquées du sceau de la passion et des incompréhensions consécutives à la guerre d'Algérie, semblaient en pleine phase de "refondation".
"Les vieilles plaies sont bien cicatrisées", les relations sont "entrées dans une ère qualitativement nouvelle grâce aux efforts louables déployés de part et d'autre", avait même déclaré M. Bouteflika lors des commémorations en France du 60e anniversaire du débarquement en Provence.
ar/pyj/mpd AFP 200450 GMT MAI 06 GMT