RABAT, 18 mai 2006 (AFP) - Les châtiments corporels sont largement pratiqués à la maison et dans les écoles primaires marocaines en dépit de leur interdiction, affirme un rapport du Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) rendu public jeudi. Selon l'étude réalisée lors du second semestre 2004 par l'Ecole supérieure de psychologie de Casablanca à la demande de l'Unicef, 73% des enseignants affirment avoir eu recours à des châtiments corporels, 54% disent avoir frappé les enfants avec une règle, un tuyau ou un bâton, et 29% avec leurs mains et leurs pieds.

Par ailleurs, 61% des parents reconnaissent frapper leurs enfants, 38% les sermonnent et 27% ont recours à la privation.

L'étude a été réalisée lors du second semestre 2004 grâce à des entretiens réalisés avec un groupe de 1.411 enfants et des questionnaires auprès de 194 écoles primaires: plus de 5.000 élèves, de 1.800 enseignants, 800 parents et 194 directeurs d'écoles ont été interrogées dans les différentes régions du royaume.

L'Algérie, Djibouti, le Maroc, la Palestine, la Syrie, la Tunisie et le Yemen se sont engagés dans la réalisation d'études sur le thème de la violence en milieu scolaire, phénomène reconnu mais abordé avec difficulté dans chacun de ces pays, explique l'Unicef.

Le bonnet d'âne n'a pas disparu car 27% des enfants marocains disent en avoir été affublés et 29% déclarent avoir vu leurs camarades les porter.

Les filles sont moins frappées que les garçons: 64% disent avoir été frappés contre 54% des filles.

"L'enquête relatives aux violences sexuelles subies par les élèves relève que ce problème n'est pas absent des écoles marocaines, cependant la fréquence doit être considérée avec prudence", ajoute l'Unicef.

Le principal motif des punitions sont les devoirs non faits: 54% des enseignants déclarent punir pour cette raison. Les autres raisons comme le manque de respect aux adultes, les retards, les disputes, les matériels cassés ou volés, les absences varient entre 6 et 10%.

Les élèves (34%) reconnaissent aussi que la première cause des punitions sont les devoirs non faits, suivie des retards (29%), des absences (26%) et des motifs vestimentaires (24%).

En outre, 52% des parents et la moitié des enfants estiment que frapper est "indispensable à l'éducation", mais ils ne sont que 33% des enseignants et 15% des directeurs à partager cet avis.

Battre les enfants est un moyen de dominer la classe, estiment 46,3% des enfants, 37,6% des enseignants, et 11% des directeurs.

52% des directeurs, 36% des enfants, 30% des enseignants et seulement 27% des parents déclarent que frapper est interdit.

Au total, la moitié des élèves punis affirment que cela crée un sentiment de peur ou d'injustice alors que 38% concèdent qu'ils le méritent. Pour 20% des élèves, les châtiments créent une haine de l'école.

La grande majorité des directeurs d'établissement et enseignants déclarent regretter d'avoir frappé les élèves après s'être emportés.

Pour régler le problème, l'Unicef avance 37 recommandations, notamment la révision des manuels scolaires pour que soient mises en exergue les valeurs de tolérance plutôt que d'incitation à la violence, l'application stricte des règles juridiques sur la question des châtiments, l'instauration d'un débat à chaque rentrée scolaire sur les droits et les devoirs des uns et des autres, l'établissement d'une auto-discipline dans les classes et la suppression des devoirs à la maison avant l'âge de 10 ans.