Le principal parti d'opposition islamiste du Maroc pense remporter les élections législatives de l'an prochain mais refuse d'indiquer jusqu'où irait un gouvernement sous sa conduite avant d'avoir pu mesurer sa marge de manoeuvre. ""C'est nous le symbole du changement"", a déclaré Lahcen Daoudi, économiste du PJD, lors d'une interview à Reuters. ""Les gens vont sanctionner les partis du gouvernement, ça, c'est une évidence."" Les observateurs n'ont pas d'avis unanime quant aux élections. Certains prévoient peu de changements dans un système où le roi nomme les principaux ministres indépendamment de l'issue des scrutins et a le dernier mot en politique étrangère.
Pour d'autres, les chances apparentes du PJD annoncent une mise à l'épreuve du sens démocratique du roi Mohammed VI.
Daoudi a déclaré qu'il serait absurde de démanteler le système politique mais qu'un gouvernement dominé par le PJD devrait donner aux Marocains le sentiment d'un nouveau départ. A ses yeux, le PJD ne peut cependant pas prendre d'engagements concrets avant de savoir quels obstacles il rencontrera: ""Vous ne savez jamais les conditions de gouvernement le premier jour, c'est au fur et à mesure que vous les découvrez, donc vous n'allez pas vous engager sur quelque chose de concret, c'est au fur et à mesure que vous allez trouver les obstacles."" Certains changements démocratiques sont inévitables, a-t-il ajouté, par exemple le choix d'un Premier ministre issu des milieux politiques plutôt qu'un technocrate comme l'actuel titulaire du poste, Driss Jettou.
""Pour moi, c'est impensable que le roi choisisse un technocrate (...) On ne peut parler de la démocratie tout en continuant à avoir un technocrate comme Premier ministre."" Après les législatives de 2002, le monarque chérifien avait rassemblé la classe politique autour d'un programme de réformes progressives en appelant au gouvernement l'opposition socialiste aux côtés de ministres nationalistes et d'élus du palais.
Mais pour Daoudi, trop de ministres se sont laissé diriger en cours de route: ""C'est la personnalité du ministre qui fait en sorte qu'on vous marche sur le bout des doigts ou pas. Si (...) le ministre de l'Intérieur intervient partout, si vous l'arrêtez et dites que c'est votre affaire, c'est tout (...) C'est fini, le temps des superministres."" Le courant islamiste marocain le plus important reste l'Al Adl Wal Ihassane refuse de participer à la vie politique avant que la constitution soit remaniée en profondeur.
""S'il y a des gens qui veulent garder les mains dans les poches, c'est leur droit (...) Quelqu'un doit aller chercher le charbon"", dit Daoudi.