Les mouvements de protestation qui s'affirment face à la forte éventualité d'une intervention américaine en Irak ne semblent épargner que très peu de pays. Ce qui nous donne l'occasion de revenir sur ces mouvements citoyens, seuls moyens de pression susceptibles d'être efficaces à l'encontre des gouvernements.

Le mois de janvier a connu une grande mobilisation des citoyens de différents pays à travers le monde contre la guerre en Irak. Maintenant, le temps jouera contre l’administration américaine d’autant que sa propre opinion publique est en train de se réveiller et de s’élever contre le militarisme de ses gouverneurs. Cette mobilisation gagne du terrain chaque jour.
Dans leur dernier rapport, les inspecteurs de l’ONU demandent au Conseil de Sécurité un délai supplémentaire pour faire correctement leur travail. Cela n’est pas du goût de ceux qui cherchent un alibi pour frapper l’Irak rapidement. Est-ce que l’administration Bush va accepter d’attendre ? Est ce qu’elle est en mesure d’apporter des preuves que l’Irak à des liens avec al-Qaïda ?
Le mois de février sera décisif pour l’Irak : soit l’Amérique va au bout de sa logique de guerre tout seul soit il y a une mobilisation massive de l’opinion publique, surtout américaine, pour pousser à une solution pacifique dans le cadre de l’ONU. Aujourd’hui, seule la mobilisation à l’intérieur de l’Amérique peut empêcher la logique de la guerre. Bush peut voir que sa réélection est sérieusement mise en jeu.
Au mois de janvier, la mobilisation a commencé timidement dans plusieurs pays, même aux USA où les manifestations étaient les plus significatives. Des manifestations contre la guerre en Irak ont réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes dans le monde, notamment aux Etats-Unis, en Europe et au Proche-Orient. Le plus important rassemblement s'est déroulé dans la capitale américaine, où 500000 participants, selon les organisateurs, ont bravé le froid pour protester devant le Capitole, siège du Congrès américain. A San Francisco (Californie), environ 50000 personnes ont défilé dans le centre-ville. Des hippies, des adolescents, des écologistes, des hommes politiques, des artistes comme l'acteur Martin Sheen ou la chanteuse Joan Baez, ont condamné la politique américaine au Proche-Orient. Des manifestations pacifistes, réunissant entre quelques centaines et plusieurs milliers de personnes, se sont déroulées samedi dans une trentaine de villes canadiennes dont Toronto, Vancouver, Ottawa, Québec et Montréal. Les organisateurs estimaient à 25000 le nombre de participants, qui ont scandé "Arrêtons la Bush-erie en Irak". Selon l’AFP. En France, 200000 personnes ont manifesté samedi dans une quarantaine de villes, à l'appel d'une coordination regroupant une quarantaine d'organisations, associations, syndicats et partis de gauche. Les manifestants scandaient "Non à la guerre contre l'Irak, justice, paix et démocratie au Proche-Orient et dans le monde !", slogan inscrit sur les banderoles des cortèges. Dans le reste de l'Europe. En Belgique, en Allemagne, en Suède, en Espagne, en Turquie et en Grande-Bretagne, la mobilisation a été variée d’un pays à l’autre. Le Japon est le seul a avoir manifesté en Asie. Au Proche-Orient, aucune manifestation n'a eu lieu dans le Golfe, avec une exception à Bahreïn. La mobilisation a été timide en Syrie, au Liban, en Egypte, en Jordanie, au Yémen, au Soudan et au Maroc, qui était auparavant habitué à faire des manifestations approchant à chaque fois le million de personnes. Mais l’opinion publique perd l’espoir : "l’opinion arabe a été neutralisée par des décennies de trahisons intérieures et extérieures. Elle n’a plus confiance. Elle ne croit ni les Américains ni les dirigeants arabes qui ont montré leur incapacité à faire face à la situation.", comme le constate Bourhane Ghalioun.
Les Pays arabes qui sont alliés de Washington, les plus concernés par cette guerre dans la région, sont contre cette guerre, mais n’osent pas fâcher l’oncle Sam, qui les a perturbés avec les déclarations de "spécialistes" américains sur les changements de la carte de la région après cette guerre. Aujourd’hui, tout le monde attend son "destin américain" de l’après-guerre. Mais l’antiaméricanisme dans la région est en train de connaître des degrés jamais atteints.
Le prochain mouvement mondial de protestation contre la guerre est prévu au milieu de mois de février. Ces protestations seront décisives pour contrer la décision de guerre de l’administration américaine. Elles sont aussi très précieuses pour motiver la diplomatie française et lui donner un nouveau souffle afin de continuer à mener les américains à la raison et au respect de la loi internationale. Le soutien de l’Allemagne est précieux, car elle va présider le Conseil de sécurité à partir de ce mois. Le réveil du Canada et de la Russie aussi peut encourager d’autres pays à rejoindre la coalition de paix des pays qui font face à l’arrogance américaine dans cette crise.
Aujourd’hui, l’Amérique, première puissance militaire et économique du monde, doit donner l’exemple du respect de la décision des Nation unies. Malheureusement son actuelle administration dominée par des néo conservateurs chrétiens et par des idéologues nationalistes se comporte d’une manière irresponsable qui cherche tous les prétextes pour s’emparer de la richesse de l’Irak. Pourtant, les USA ont déjà réalisé certains de leurs objectifs dans la région : leur armée a des bases dans tous les pays du Golfe même au Yémen. Pour le moment, il n’y a que la Syrie, l’Iran et l’Irak qui échappent à la domination américaine au Moyen-Orient. Cela pousse à poser des questions sur cette situation : est-ce normal qu’un seul pays puisse contrôler la richesse de la région et décider de la transformation géostratégique dans la région ? Aujourd’hui la France est devant de grandes responsabilités, mais aussi toute l’Europe et les pays du monde devant cette domination unilatérale d’un seul pays. Cela nous rappelle des moments tristes dans l’histoire de l’humanité.
Mais la question qui se pose aujourd’hui face à cette incapacité des Etats du monde à ramener à la raison une superpuissance est la suivante : est-ce que les mouvements citoyens à travers le monde surtout en Amérique peuvent arrêter les projets chaotiques de l’actuelle administration américaine ? A vous, citoyens du monde, d’empêcher la guerre !